Recommandation (n° 204) sur la transition de l’économie informelle vers l’économie formelle, 2015

Type de publication: 

Source: Organisation international du Travail

Préambule

La Conférence générale de l’Organisation internationale du Travail,

Convoquée à Genève par le Conseil d’administration du Bureau international du Travail, et s’y étant réunie le 1er juin 2015, en sa 104e session;

Reconnaissant que, de par son ampleur, l’économie informelle, sous toutes ses formes, constitue une entrave de taille aux droits des travailleurs, y compris les principes et droits fondamentaux au travail, à la protection sociale, à des conditions de travail décentes, au développement inclusif et à la primauté du droit, et qu’elle a un impact négatif sur l’essor des entreprises durables, les recettes publiques, le champ d’action de l’Etat, notamment pour ce qui est des politiques économiques, sociales et environnementales, ainsi que sur la solidité des institutions et la concurrence loyale sur les marchés nationaux et internationaux;

Constatant que la plupart des individus n’entrent pas dans l’économie informelle par choix mais du fait du manque d’opportunités dans l’économie formelle et faute d’avoir d’autres moyens de subsistance;

Rappelant que c’est dans l’économie informelle que les déficits de travail décent – déni des droits au travail, insuffisance des possibilités d’emploi de qualité, protection sociale inadéquate et absence de dialogue social – sont les plus prononcés;

Constatant que l’informalité a des causes multiples qui relèvent notamment de questions de gouvernance et de questions structurelles, et que les politiques publiques peuvent accélérer le processus de transition vers l’économie formelle, dans un contexte de dialogue social;

Rappelant la Déclaration de Philadelphie, 1944, la Déclaration universelle des droits de l’homme, 1948, la Déclaration de l’OIT relative aux principes et droits fondamentaux au travail et son suivi, 1998, et la Déclaration de l’OIT sur la justice sociale pour une mondialisation équitable, 2008;

Réaffirmant la pertinence des huit conventions fondamentales de l’OIT, et des autres normes internationales du travail et instruments des Nations Unies pertinents énumérés dans l’annexe;

Rappelant la résolution et les conclusions concernant le travail décent et l’économie informelle, adoptées par la Conférence internationale du Travail à sa 90e session (2002) et les autres résolutions et conclusions pertinentes énumérées dans l’annexe;

Affirmant que la transition de l’économie informelle vers l’économie formelle est essentielle pour réaliser un développement inclusif et le travail décent pour tous;

Reconnaissant la nécessité pour les Membres de prendre d’urgence des mesures appropriées permettant la transition des travailleurs et des unités économiques de l’économie informelle vers l’économie formelle, tout en garantissant la préservation et l’amélioration de leurs moyens de subsistance durant la transition;

Reconnaissant que les organisations d’employeurs et de travailleurs jouent un rôle important et actif pour faciliter la transition de l’économie informelle vers l’économie formelle;

Après avoir décidé d’adopter diverses propositions relatives à la transition de l’économie informelle vers l’économie formelle, question qui constitue le cinquième point à l’ordre du jour de la session;

Après avoir décidé que ces propositions prendraient la forme d’une recommandation;

adopte, ce douzième jour de juin deux mille quinze, la recommandation ci-après, qui sera dénommée Recommandation sur la transition de l’économie informelle vers l’économie formelle, 2015.

 I. Objectifs et champ d’application

  1. 1. La présente recommandation vise à orienter les Membres pour:
    • a) faciliter la transition des travailleurs et des unités économiques de l’économie informelle vers l’économie formelle tout en respectant les droits fondamentaux des travailleurs et en offrant des possibilités de sécurité du revenu, de subsistance et d’entrepreneuriat;
    • b) promouvoir la création d’entreprises et d’emplois décents, leur préservation et leur pérennité dans l’économie formelle, ainsi que la cohérence entre les politiques macroéconomiques, d’emploi, de protection sociale et les autres politiques sociales;
    • c) prévenir l’informalisation des emplois de l’économie formelle.
  2. 2. Aux fins de la présente recommandation, les termes «économie informelle»:
    • a) désignent toutes les activités économiques des travailleurs et des unités économiques qui – en droit ou en pratique – ne sont pas couvertes ou sont insuffisamment couvertes par des dispositions formelles;
    • b) ne désignent pas les activités illicites, en particulier la fourniture de services ou la production, la vente, la possession ou la consommation de biens interdites par la loi, y compris la production et le trafic illicites de stupéfiants, la fabrication et le trafic illicites d’armes à feu, la traite des personnes et le blanchiment d’argent, tels que les définissent les conventions internationales pertinentes.
  3. 3. Aux fins de la présente recommandation, les unités économiques de l’économie informelle comprennent:
    • a) les unités qui emploient de la main-d’œuvre;
    • b) les unités détenues par des particuliers travaillant à leur propre compte, soit seuls, soit avec le concours de travailleurs familiaux non rémunérés;
    • c) les coopératives et les unités de l’économie sociale et solidaire.
  4. 4. La présente recommandation s’applique à tous les travailleurs et à toutes les unités économiques de l’économie informelle, comprenant les entreprises, les entrepreneurs et les ménages, en particulier:
    • a) aux personnes opérant dans l’économie informelle qui détiennent et administrent des unités économiques, y compris:
      • i) les travailleurs à leur propre compte;
      • ii) les employeurs;
      • iii) les membres des coopératives et des unités de l’économie sociale et solidaire;
    • b) aux travailleurs familiaux non rémunérés, qu’ils travaillent dans des unités économiques de l’économie formelle ou de l’économie informelle;
    • c) aux salariés ayant des emplois informels au sein des entreprises formelles ou des unités économiques de l’économie informelle, ou travaillant pour elles, notamment dans le cadre de la sous-traitance et des chaînes d’approvisionnement, ou en tant que travailleurs domestiques rémunérés employés par des ménages;
    • d) aux travailleurs dont la relation de travail n’est pas reconnue ou pas réglementée.
  5. 5. Le travail informel peut être observé dans tous les secteurs de l’économie, tant dans les espaces publics que dans les espaces privés.
  6. 6. En donnant effet aux dispositions figurant dans les paragraphes 2 à 5 ci- dessus et compte tenu des diverses formes que l’économie informelle peut revêtir dans les Etats Membres, l’autorité compétente devrait identifier la nature et l’étendue de l’économie informelle telle que décrite dans la présente recommandation, ainsi que sa relation avec l’économie formelle. Pour ce faire, l’autorité compétente devrait avoir recours à des mécanismes tripartites auxquels participent pleinement les organisations d’employeurs et de travailleurs les plus représentatives qui devraient compter dans leurs rangs, conformément à la pratique nationale, les représentants d’organisations représentatives dont les membres sont des travailleurs et des unités économiques de l’économie informelle.
Cliquer pour lire sur le site de l'auteur

Laisser un commentaire

CAPTCHA
Cette question sert à vérifier si vous êtes un visiteur humain ou non afin d'éviter les soumissions de pourriel (spam) automatisées.


Dans la même thématique: